En passant par le
midi (moins le quart), le Toine est passé voir Marinette dans sa drôme
provençale.
C'était pas le bon
jour.
Il trouva
Marinette, la pioche menaçante au dessus de la tête, le visage grimaçant trempé
de sueur qui s'acharnait sur son lopin de terre.
Le Toine c'est pas
un timide, il a le verbe facile, mais il a hésité un moment avant de choisir
l'angle d'attaque... la Marinette se présentait mal.
-- Oh Marinette, tu
as des taupes dans ton jardin ?
Elle releva à peine
le visage, pendant que ses bras s'abattaient une nouvelle fois avec rage sur
son labour.
Apercevant le
Toine, elle se releva, quitta quelque peu son air renfrogné et posa son
outil.
-- Tiens !?... le
Toine !!... mais qu'est- ce que tu fais là ?
-- Je passe te
voir, pardi....... mais dis moi, tu cherches du pétrole ?
-- M'en parle pas,
je l'aurais trouvé depuis le temps !... je suis contente de te voir Toinou !
Elle s'essuya les
mains sur son tablier avant d'accompagner le Toine vers les chaises
sous la tonnelle.
-- Ton Louis n'est
pas là ?
-- Non, il est
parti pour la journée à un regroupement : AREDVI (Association Régionale
d”Expérimentation et de Développement Viti-vinicole) à moins que ce soit
à l' ARDEPI (Association Régionale pour la maîtrise des
irrigations)...???...peut être à la DRAF ? (Direction régionale de
l'agriculture et de la forêt) ou au GAEC (Groupement agricole d'exploitation
en commun) pour le projet de l' IFIP ( Institut du Porc) ???
-- Punaise ! des
instituts pour porcs ?... on aura tout vu... mais de quoi tu me parles là ??...
ton Louis s'est converti à la politique ?
-- Qu'est-ce que
j'en sais moi !??... toujours est-il que je ne comprends plus rien à
rien.
Le Louis a toujours
été un taiseux, tu sais bien, mais le peu qu'il disait, je l'écoutais, je le
comprenais, je l'interprétais à ma manière, j''en faisais mien. Je lui
répondais et j'en profitais pour donner mon avis sur le sujet et même à côté et
un peu plus loin. Il n'avait qu'à poser le train sur les rails et moi je
faisais la locomotive.
-- ...... et alors
?...... .il veut plus prendre le train ?
-- Figure toi que
le mois dernier, le maire est passé avec sa sacro sainte culture... pas la
mienne, ... celle qu'on essaie de t'apprendre à l'école, qu'on cueille dans les
livres et même dans les ordinateurs maintenant.
Bah... moi je m'y
connais mieux en confitures, que veux-tu !?
Leur culture, je
trouve que c'est barbant et triste.Tous ceux qui en ont se croient obligés de
parler, raconter, expliquer, pour faire voir qu'ils en ont. Ils n'ont rien à
écouter des autres. Ils déversent leurs connaissances chaque fois que quelqu'un
de nouveau arrive pour être sûrs qu'ils ont l'air cultivé pour tout le monde. Je
sais pas si ça apporte vraiment quelque chose aux autres de déblatérer sa
science quand ils n'ont rien demandé.
Ça sert peut être
juste à avoir l'air pour soi. Le Louis, il aime se cultiver en dehors du
jardin, pas pour le montrer aux autres, mais pour se faire plaisir à lui, pour
avoir l'impression de pas perdre son temps sur terre.
Pendant ce temps,
moi je la remue.
Cet imbécile de
maire lui a parlé d'un Léon-Paul... connais pas, il va pas au banquet de la
classe sinon je le saurais avec un prénom comme celui là...il a dû le rencontrer au marché ou au
congrés de l'APREL ( Association Provençale de Recherche et d’Expérimentation
Légumière) à Aix, c'est là qu'il a dû prendre le melon... il aurait dit que pour
être un bon écrivain, il fallait enterrer un mot chaque jour... quelle idée
!? je me demande ce qu'il récolte...
Mon Louis a bien
enterré les conduits d'évacuation des eaux, les patates et même les chats de la
voisine mais j'aurais jamais cru qu'il irait jusqu'à enterrer le peu de mot
qu'il disait pour devenir écrivain. J'en suis encore toute chamboulée.
Alors depuis, il envoie des messages en morse bourrés de sigles, sans même une indication avec les mains ou les
yeux, ou un froncement de sourcils et moi je suis née
après guerre, je connais pas le morse, ça se débite sans expression et sans chaleur ... moi qui
aimait tant les berceuses et les poésies.
Comme les arbres
perdent une à une leurs feuilles à l'Automne, le Louis s'est déshabillé de ses
mots un à un au jardin... alors je piétine mon POS (Plan d’Occupation des Sols)
je sabote mon SAU ( Surface agricole utile) et quitte à retourner toute ma ZAP
( Zone agricole protégée) je veux retrouver les mots de mon Louis.Tiens Toinou, finis ton verre, viens me donner un coup de main et
... BAF (Bienvenue à la ferme) !
... BAF (Bienvenue à la ferme) !
ça sert à quoi que l'Mathieu s'échine à les enterrer si la Marinette les déterre?
RépondreSupprimerC'est bien du boulot pour rien!
Me méfierai des consignes la prochaine fois :)
La Marinette elle aime bien faire le contraire :))
SupprimerC'est drôle, Santoline, ce matin j'essayais de lire un article de presse et j'avoue qu'il y avait plus de sigles que de mots là-dedans !
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup ton récit - il n'est pas piqué des vers ! (pour bien plaire à ta narratrice !)
C'est vrai quoi, y'en a marre de leurs gros mots !
Supprimer;)
Comme une réponse au Mathieu de Vegas :-) et elle est bien menée ton histoire. J'aime beaucoup. Bravo Santoline.
RépondreSupprimerMerci Anne-Ma.
RépondreSupprimerLe Mathieu n'a plus qu'à bien se tenir :)
Un p'tit lopin de terre avec une tonnelle et des chaises, sympa !
RépondreSupprimerJe prendrais bien un gorgeon avec le Toine!
Pour moi ce sera une B.B.F.S.F.C. *
Dis-moi, la Drôme provençale, c'est-y pas en R-A ?
* Bonne Bière Fraîche Sans Faux-Col
TAFÇ
SupprimerTout à fait ça ! :))
Bravo pour ce texte coloré qui nous montre ce qui se passe quand on transforme Saint-Paul-de-Vence en Saint-Léon-Paul-en-Provence !
RépondreSupprimer;-)