Il ne fumait plus.
La loi Evin n’était
pour rien dans ce choix. D’ailleurs, était-ce réellement un choix ? Une
nécessité dirons-nous, ou plutôt une obligation ! Monsieur Le Juge, sur ce
point, avait été formel :
–
“ Jeune homme, vos incivilités à répétition,
votre sans-gêne notoire ont assez duré, on ne jette pas ses mégots, comme cela,
impunément, dans la nature … “
–
“ Je n’avais pas de cendrier ... ! “
–
“ Et de surcroît, en plein mois d’août par une
chaleur caniculaire ! Votre inconscience n'a d'égale que votre bêtise, cette
fois-ci vous avez passé les bornes, le feu a détruit entièrement le jardin
public du village et la campagne alentour. “
–
“
C’est la goutte d’eau qui a fait déborder la vase ! “ avait-il rétorqué,
hilare. “
–
“ L'étincelle qui a mis le feu aux poudres
serait plus approprié “ avait repris Monsieur le Juge, parfaitement insensible
au trait d'esprit plus ou moins fumeux de l'apprenti pyromane.
L'étincelle
avait valu à ce dernier quelques soucis. Il avait écopé, dans le feu de
l'action, d’une amende pour outrage à magistrat et d'une peine d’emprisonnement
pour incendie criminel, sa conception de l'écobuage n'étant pas en parfaite
symbiose avec celle du juge !
Enflammer tout le canton est une chose, se moquer des édiles en est une
autre ! Adieu les cigarettes !
Il avait, quelques
années plus tard, retrouvé l’air libre et avec lui, l’envie furieuse de s’en
griller une, comme au bon vieux temps.
Il se souvenait,
bleu gitane, bleu gauloise, le cellophane que l’on déchire, et que l’on froisse
pour ouvrir le paquet, le claquement sec du briquet, la fumée légère qui
s’élève en volutes odorantes et pique un peu les yeux, le grésillement du
tabac, la cendre qui rougeoie et tombe dans … ah oui ! penser à acheter un
cendrier !!!
Il se rappelait
aussi ce juge, personnage froid, bougon, sans aucun humour qui n'aimait pas
jouer avec le feu et l’avait expédié à l’ombre sans aucun état d’âme.
- “ J’te fumerai la couenne vieux schnock, tu
brûleras en enfer ! “
Il avait marché
jusqu’au palais de justice de la ville voisine et … craqué l’allumette.
...
J'aime beaucoup ta façon de raconter, et ta description des souvenirs du tabac, du paquet, et le tout est parfait. Parole d'ex-fumeuse de Gauloises longues
RépondreSupprimerToujours un grand plaisir de te lire ici, Sable !
L'ancienne fumeuse ( de gauloises et de gitanes )que je suis a gardé le souvenir de cette addiction dont je suis ravie d'être débarrassée.
RépondreSupprimerBeaucoup de plaisir pour moi d'être ici.
On sent l'experte en mots tu expliques parfaitement tes souvenirs de fumeuse
RépondreSupprimer"Il avait marché jusqu’au palais de justice de la ville voisine et … craqué l’allumette."
Très beau texte ... Merci pour ce bon moment Sable du temps
Merci à toi d'avoir pris le temps de me lire.
SupprimerOui j'avoue j'ai beaucoup fumé, mais je n'ai jamais mis le feu au patrimoine local ! ! !
Eh ben oui, c'est comme ça, les vraies têtes brûlées ! ;-)
RépondreSupprimerC'est vrai, tout feu tout flammes, brûler la chandelle par les deux bouts ! La vie quoi !
RépondreSupprimerEt aussitôt après, il s'envola pour Toronto sur un vol Canad'Air...
RépondreSupprimerTon texte fait froid dans le dos...
une petite flambée pour te réchauffer ? ! ! !
Supprimer