Trempé
de sueur, Luigi se réveille en sursaut. Non, ce n’est pas un cauchemar, c’est
encore sa jambe qui le démange. Rien qu’une démangeaison, certes, mais elle est
insoutenable. Son mollet fourmille de picotements.
Un
proverbe de son pays dit « dans chaque lit, il y a des poux » hélas !
pas dans le sien. Luigi a une bonne hygiène de vie et est très strict sur la
propreté. Dans son lit il n’y a pas de poux mais il aurait tant aimé qu’il y en
eût. C’eût été trop simple en effet, il aurait ainsi pu identifier les
coupables responsables de son tourment et s’en débarrasser comme de la vermine.
Comme
les picotements continuent, il tend la main, machinalement, pour se gratter.
Elle ne rencontre que le vide. Une fois encore, il est tombé dans le panneau,
il se fait prendre à chaque fois. Difficile en effet de se gratter la jambe, de
se gratter une jambe qu’on n’a plus, amputée sous le genou depuis un accident
de déminage alors qu'il était sous mandat de l'ONU en Bosnie.
Impossible
de soulager cette sensation fantôme, gênante, douloureuse et envahissante. Un
sentiment d’impuissance à s’en taper la tête contre les murs !
Il
ne se rendormira plus maintenant et déclenche son baladeur. La belle voix,
douce, nasale et chaude de Jean-Claude ACQUAVIVA, chanteur du groupe corse A
Filetta entonne « Comme un souffle ».
Près
de son lit, l’applique murale diffuse une lumière douce. Cette lampe lui
rappelle la face voilée des femmes musulmanes qu’il a essayé de protéger du
nettoyage ethnique à Srebrenica. Luigi l’aime bien cette lampe, sa belle
Herzégovine, celle qui l’apaise quand la douleur est trop forte. C’est
maintenant à elle de le protéger.
La complainte estompant ses fourmillements il
peut contempler à loisir sa jolie sarrasine. Aujourd’hui la jeune Bosniaque est
triste. Il croit même apercevoir une larme perler sous son voile. Son beau
visage semble regarder vers le bas, là où, sur la descente de lit, l’attend sa
prothèse, inerte, démontée pour la nuit.
Un texte plein d'émotions, joli ! Bravo Sklabez
RépondreSupprimerMerci, Anne-Ma !
SupprimerJe me dois de t'avouer quelque chose, en écrivant ce texte, j'ai moi-même été submergé par l'émotion.
Terrible frustration que cette hallucinose, ce symptôme du membre fantôme... heureusement la jeune Bosniaque est bien vivante... triste mais vivante
RépondreSupprimerTerrible frustration que j'ai maladroitement racontée. Les personnes qui ont été amputées souffrent un véritable martyre. Cette sensation désagréable est permanente et, souvent, il n'y a que la mort pour les en délivrer.
SupprimerIci Luigi se raccroche à sa jeune Bosniaque. Comme je le comprends !!! Elle est tellement belle !
Merci Vegas !
Un moment trop récent pour encore être de l'histoire mais ta vignette prouve le contraire. C'est très, très, très intéressant et jamais, au plus jamais, n'aurais-je rêvé d'un tel texte basé sur l'image.
RépondreSupprimerJe vais essayer de rectifier la police, je ne sais pas pourquoi elle change juste avant la fin. Merci !
Ce que tu me dis me fait énormément plaisir, Joye.
SupprimerIl m'arrive assez souvent d'être assez déçu de mes prestations.
Celle-ci a pris du temps pour germer, mais elle me procure une certaine satisfaction. Faut-dire que ta très belle image m'a inspiré.
Pour la police, c'est entièrement de ma faute, l'erreur était déjà présente dans le fichier html. Je ne l'ai pas vérifié avant de te l'adresser.
Merci de ta rectification.