Ce jour là, à
Brive la Gaillarde, tôt le matin, une foule inhomogène se massait devant les
portes fermées du cabinet d'ophtalmologie du Dr Berthold.
Depuis quelques années, en différents endroits du pays, ce type de scène était devenu presque banal, néanmoins deux pandores débonnaires surveillaient la manifestation presque silencieuse.
Quelques excités s'autorisaient à extérioriser leur mauvaise humeur : "il y en a marre, c'est ainsi à chaque premier lundi du trimestre, l'ophtalmologiste ouvre (entrouve) son agenda pour les rendez vous des trois mois à venir" et il est vite complet.
Peut être aurait il été préférable de téléphoner, suggéraient certains.
Téléphoner ??? vous voulez rire ... le téléphone sonne occupé dès les premières heures de la matinée, et si on veut avoir une chance d'être un jour examiné par l'inaccessible praticien, mieux vaut prendre sa matinée de RTT pour faire le pied de grue devant le secrétariat.
Mais, il est si bon que ça ? demandaient perfidement les novices.
Pas forcément, répondaient les habitués blasés, mais son concurrent fait la même chose, sa secrétaire est moins jolie, et ici, on peut facilement se garer...
A quoi tient la réputation d'un médecin, quand même,... marmonaient certains.
Un professeur de lettres à la retraite en profita pour caser l'une de ses citations favorites légèrement détournée pour l'occasion : "en amour, (comme en médecine) on plaît plutôt par d'agréables défauts que par des qualités essentielles... (Ninon de Lenclos). Il ne déclencha que quelques soupirs agacés.
Effectivement le praticien était réputé tant pour son caractère difficile, que par le temps qu'il prenait avec chacun(à condition que le chacun ait réussi à passer la dure épreuve de la prise de rendez vous).
Parfois, murmuraient certains, il lui arrive de menacer de facturer ses honoraires en fonction du temps passé avec le malade, et d'utiliser une pendule d'échecs.
"Mais il n'a pas le droit", s'insurgeaient quelques uns !
C'est évident, mais il menace quand même...et c'est pour ça qu'il ne faut pas le pousser à bout...Il faut savoir prendre soin de son médecin.
Certains passent deux ou trois heures debout à attendre et je vous jure que lorsque la secrétaire vient annoncer que tous les rendez vous sont donnés et que les autres devront retenter leur chance au début du prochain trimestre, il y a des cris et des larmes dans la foule.
Pour un peu on se croirait en URSS avant la chute du mur !
Soudain, monte un grondement : ah ! la secrétaire est arrivée, ça bouge, la porte va bientôt s'ouvrir, attention, poussez pas derrière ! c'est parti , pas de quartiers, maintenant c'est chacun pour soi !
Ma parole ! C'est pire que les soldes !!! ;-)
RépondreSupprimerJoli texte Zigmund et bravo pour le respect de la consigne. Chapeau !
Oui ! Je ne peux pas dire que je suis vraiment hors de moi, mais c'est avec JOIE que je relis notre cher docteur zig ici.
RépondreSupprimerMerci zig, et bravo !!!
J'ai voulu jeter un oeil et je ne l'ai pas retrouvé dans la queue ! ... fait pas bon être borgne à Brive la Gaillarde !
RépondreSupprimerMerci de nous avoir fait patienter !
:))
Connaître un ophtalmologiste qui soigne à l'oeil... tient surtout du fantasme :)
RépondreSupprimerIl y avait le fameux marché de Brive la gaillarde et voici maintenant son incroyable ophtalmo ! Un texte étonnant et détonant !
RépondreSupprimerC'est trop tentant, quand on connaît un peu l'ami Zigmund, d'ajouter juste un mot à sa dernière ligne sous forme d'un commentaire ultra court : GO !
RépondreSupprimer